Pourquoi la création d’une agence publique de notation est une nécessité ?

L’année dernière  le Royaume Uni a rejoint le cercle des pays développés à être dégradés par les agences de notations. En 2011, on se souvient des nombreux spécialistes nous prédisant le pire en cas de dégradations de notes. Aujourd’hui, on constate qu’il en est rien. Les taux d’intérêts d’emprunts de ces trois pays ont peu évolué après leurs dégradations.

 On est donc amené à se poser la question de l’intérêt réel de ces agences. Sont-elles vraiment nécessaires ?

 Il faut donc commencer par s’intéresser à leur rôle qui est de collecter et d’analyser les données comptables (bilan, compte de résultat, budget) des entreprises et des états. Elles évaluent leur capacité à rembourser leurs dettes. Après cela, elles leur attribuent une note moyennant rémunération. Pour pouvoir emprunter sur les marchés financiers mondiaux, les acteurs doivent être notés par Standard&Poors, Moody’s et Fitch

 Se pose déjà un problème de conflit d’intérêt. Les agences sont elles toujours objectives concernant l’évaluation de leurs clients ? On peut penser que non. Lehman Brothers était notée AAA, la meilleure note, la veille de son effondrement. Pour rappel la faillite de cette banque était le déclencheur de la crise. Cet épisode laisse penser un éventuel conflit d’intérêt entre Lehman et les agences.

 Durant les années avant crise, elles se sont également mises à noter les produits financiers. Ainsi elles ont rien trouvé de mieux à faire que de noter AAA les produits ABACUS élaborés par leurs compères de Goldman Sachs. Ces produits soit disant peu risqués étaient bourrés de crédit hypothécaires américains « subprimes » hautement risqués. La propagation de ces produits à l’ensemble de la planète est une des causes de la crise

 Heureusement des réactions commencent à se mettre en place devant leurs notations erronées. Ainsi en Australie, treize collectivités locales ont  porté plainte contre Standard& Poors, après avoir beaucoup perdu dans les produits ABACUS.

 Pour leurs défenses, les agences affirment qu’elles ne représentent qu’un avis parmi d’autres. Seulement voilà, ces agences sont en situation d’oligopole sur le marché, les autres avis sont peu nombreux. Ce n’est pas le fond de leur mission initiale qui est critiquable mais plutôt la forme. Tout oligopole est néfaste à une économie de marché. On n’a pas besoin d’agences aussi importantes.

 Alors que faire ? Chaque banque centrale de l’Eurozone analyse et note la solvabilité des entreprises. Ces analyses sont exclusivement diffusées aux banques commerciales. Pourquoi ne pas alors diffuser ces notations auprès des marchés financiers ?  La Banque Centrale Européenne se chargerait de collecter les données de l’ensemble de la zone euro.

 Cette mission de service public permettrait d’éviter les conflits d’intérêts et diminuerait le pouvoir  des agences de notations. Les agences de notations, quant à elles, continueraient à évaluer les états. Elles seraient au moins mises en concurrence sur leurs activités d’évaluations d’entreprises.

 Malheureusement, la Commission Européenne a décidé de repousser le projet de création d’agence européenne aux calendes grecques.